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Un sac sur le dos Un sac sur le dos
Amandine

Métamorphose. C’est dans une ambiance de coulisses de cinéma que j’ai revêtu les nombreuses couches de maquillage et de tissus, jouant entre les nuances de tons blancs et rouges, afin de me transformer. Le temps d’une journée, je me suis glissée dans la peau d’une geisha, accompagnée de François dans le rôle du fier samouraï. Une expérience insolite, romantique, drôle et photogénique que nous avons vécue à Kyoto, au parc Toei Studio. Je vous raconte tout cela !

Se transformer en geisha à Kyoto

La photographie par excellence du Japon : un temple ou une ruelle aux petites maisons de bois, quelques lampions rougeoyants, et une geisha à la peau blanche et au doux visage. Pourtant, croiser une « vraie geisha » n’est pas chose facile. Oiseaux nocturnes, elles ne sortent qu’à la tombée de la nuit pour rejoindre les clients de restaurants élégants.

Alors pourquoi sont-elles sur toutes les photos ? D’une part, car elles sont intimement liées aux représentations romantiques que nous avons du Japon et encore plus de Kyoto. Un peu comme les Japonais s’imaginent toutes les Françaises en jupe légère et t-shirt rayé surmonté d’un béret ! Et, d’autre part, car les geishas sont nombreuses dans les rues japonaises, surtout devant les temples et dans les quartiers touristiques… mais ce sont des touristes costumées pour l’occasion !

Mais qu’est-ce qu’une geisha ?

Avant d’aller plus loin dans le récit de cette expérience qu’on a adorée, petit point culture. Tout le monde en a déjà entendu parler, beaucoup ont quelques images en têtes, certains ont vu ou lu Mémoires d’une geisha… mais peu savent vraiment les définir. Qu’est-ce qu’une geisha ?

Littéralement « personne pratiquant les arts », les geishas vouent leur vie aux arts traditionnels nippons. Danses, maniement de l’éventail, chant, maitrise d’instruments de musique, composition florale, cérémonie du thé, poésie et littérature font partie de leur formation, tout comme l’art de la conversation.

Formation qui inclut aussi la maitrise du code vestimentaire et maquillage. On peut d’ailleurs, rien qu’à leur allure, distinguer les geishas qui ont terminé leur formation de celles qui sont encore en apprentissage et que l’on appelle maiko (littéralement « fille qui danse »). De manière générale, les apprenties sont vêtues, coiffées et maquillées de façon beaucoup plus colorée, et les geishas de façon plus simple.

Si le maquillage et la coiffure sont une étape importante de leur préparation (comme j’ai eu l’occasion de le découvrir), l’habillement l’est tout autant ! La tenue se compose principalement du kimono (avec différentes couches) et de l’obi, la ceinture. La façon de la fermer dans le dos est également codifiée selon l’âge et le statut de la geisha. Et, touche finale : les chaussettes blanches (tabi) que l’on enfile avant de se glisser dans les pesantes sandales de bois (geta).

Incarnation vivante du raffinement, leur but est de divertir les plus fortunés et influents à l’occasion de réception, banquets et spectacles. Car être geisha, ce n’est pas qu’une question d’apparence et de connaissances. C’est aussi et surtout une question d’attitude. Lorsque l’on en croise une dans la rue, aucun doute ne peut subsister. D’une élégance rare, elle semble glisser sur son chemin, la tête haute avec un mélange de fierté, de retenue et de douceur.

Donc, ôtons tout de suite un doute, cassons cette rumeur : les geishas ne sont pas des courtisanes ! De nos jours, la tradition des geishas reste vivante, même si leur nombre a fortement diminué. La ville de Kyoto est considérée comme le berceau des geishas et c’est l’un des meilleurs endroits pour en apercevoir… ou se glisser dans ses vêtements le temps d’une heure ou d’une journée !

Petite remarque avant de poursuivre mon récit S’il vous plait, ne faites pas partie de ces voyageur·euse·s qui poursuivent littéralement les geishas/maikos dans les rues pour les prendre en photo, ni de celleux qui attendent devant la porte de certains salons de thé pour guetter leurs allers et venues, ou devant les fenêtres de restaurants afin de capturer l’un ou l’autre cliché. Voir une geisha de cette façon, c’est dépouiller la rencontre d’élégance et de retenue, qualités qui leur sont pourtant si attachées ! Croiser une geisha, c’est une question de timing (être dans le bon quartier au bon moment, en début de soirée), mais aussi une question de chance. Et si vous voulez l’assurance d’en voir, pourquoi ne pas opter pour un spectacle où geishas et maikos font une démonstration de leur art ?

Comme au cinéma

Tout commence devant un comptoir sur lequel est posé un gros livre rempli d’images de samouraï, ninja, maiko et geisha. Devant toutes ces tenues, toutes ces coiffures, difficile de choisir ! Mon œil reste accroché par les kimonos rougeoyants et les coiffures surmontées de parures de fleurs. Enfin, je pointe du doigt l’un des modèles, François un autre. L’aventure peut commencer.

Après avoir enlevé nos chaussures pour pénétrer véritablement dans le domaine des maquilleuses et habilleuses, nous passons en cabine afin de laisser nos vêtements et nos identités, revêtant pour le moment uniquement une sous-couche de kimono et une seconde couche qui nous enveloppe comme un grand peignoir. L’heure est au maquillage.

Maquillage et métamorphoses

Moi qui ne me maquille jamais, la transformation promet d’être encore plus saisissante que pour une autre femme… Alors que la maquilleuse me regarde avancer un sourire bienveillant aux lèvres, son regard expert est déjà au travail. Et quel travail ! Je ne m’imaginais pas, en m’asseyant sur ma chaise devant le miroir, que j’allais y demeurer pratiquement une heure. Une couche après l’autre, elle recouvre mon visage de poudre et crème blanche… Comme l’impression d’être un bâtiment qu’on refaçonne entièrement ! À chaque couche, je me demande ce que la maquilleuse va encore pouvoir ajouter, et c’est avec un étonnement discret (afin de ne pas boucher les traits de mon visage) que je compte au total cinq couches rien que pour blanchir mon visage !

Après le blanc vient le rouge. Par discrets coups de pinceau, la voilà qui redessine mes sourcils et mes lèvres, puis me poudre légèrement les joues et les paupières. Alors qu’elle tient le pinceau à quelques millimètres de mon visage, évaluant les retouches à opérer, mes yeux parviennent à atteindre l’autre du bout du miroir, là où se trouve François. Et là où je me retenais depuis longtemps de bouger, de remuer le bout du nez qui me démangeait depuis quelques minutes et toucher le coin des yeux qui ne demande qu’à pleurer… là, je ne peux retenir une exclamation de surprise suivie d’un fou rire qui me vient du plus profond de mon être.

J’avais beau avoir vu le modèle qu’il avait choisi, jamais je n’aurai imaginé voir mon cher et tendre transformé à ce point ! La métamorphose est saisissante ! Un jeu de deux perruques permet de simuler la coiffure très particulière des samouraïs, avec le crâne rasé. Là où mon teint a été blanchi, le sien a pris une teinte plus bronzée. Ses yeux, légèrement cerclés de noir, me renvoient un regard tout aussi amusé et incrédule que le mien !

Le fou rire m’envahit de la tête au pied. Je suis pliée en deux sur mon fauteuil, partagée entre l’hilarité et l’embarras de devoir faire attendre ma maquilleuse, qui nous regarde tous les deux avec un amusement discret. J’essaye de reprendre le contrôle de mes muscles abdominaux et de me redresser en évitant les spasmes que cette crise de rire m’inflige… Mais il me faudra plusieurs minutes avant de retrouver l’impassibilité nécessaire à la poursuite de la séance de maquillage.

François, lui, est prêt à passer à l’étape suivante : l’habillage.

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En pleine séance de maquillage

Kimono, tels les pétales d’une fleur

Retour à la cabine d’essayage, accompagnée d’une habilleuse… et heureusement : je n’aurai jamais réussi à m’en sortir seule dans tout ce dédale de tissus ! Sur mon kimono sous-couche, une première couche est posée sur mes épaules, afin de donner de la couleur et une certaine forme à mon col, bien serré devant et évasé dans le haut du dos. Ensuite, une autre couche me recouvre, une autre m’enserre au niveau de la taille et de la poitrine, avant de voir finalement les couches extérieures colorées posées. Me voilà aussi rose qu’un cerisier en fleuraison !

Vient ensuite l’étape de l’obi, la ceinture. Je ne m’imaginais pas que c’était si complexe, tant au niveau de sa composition que de son placement ! Je retiens mon souffle et me voilà harnachée à mes vêtements fleuris, la poitrine compressée par toutes ces couches et surtout les derniers réglages de la ceinture qui se porte très haut.

Je me regarde dans le miroir et vois se dessiner dans le reflet un sourire incrédule :

C’est moi qui souris là, vraiment ?

Touches finales

Me voilà prête à accueillir sur ma tête une resplendissante perruque, à la coiffure si élaborée et décorée que pesante ! Sur le côté de mon visage, les décorations tombent en cascade et carillonnent à chacun de mes mouvements de tête, comme les bourgeons fleurissants d’une branche agitée par la brise.

Légèrement déséquilibrée par le poids que doit soutenir ma tête et la faible amplitude de mouvement que m’autorise mes nouveaux atours, il me reste pourtant encore une étape avant de pouvoir quitter le centre de transformation : les chaussures. Devant le sol surélevé du magasin m’attendent déjà mes sandales de bois. Elles m’ont l’air si petites… et si bancales ! Avec leur talon compensé, je vais paraitre encore plus disproportionnée à côté des Japonaises ! Mais c’est surtout la forme de leur base qui m’inquiète, l’avant de la chaussure n’étant pas supporté de la même façon, ce qui risque de demander une grande maitrise pour marcher avec un air digne…

Dignement ou non, je suis prête à sortir explorer le parc !

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Costumée de la tête au pieds

Une geisha et un samouraï dans le Japon des traditions

Notre sortie du magasin ne passe pas inaperçue. À peine avons-nous fait quelques pas que des visages se tournent sur notre passage, les sourires illuminant le visage de tous ceux que nous croisons. Des « gaijin » (étrangers) costumés avec autant de soin, ça amuse beaucoup semble-t-il. Rapidement, nous réalisons que nous sommes pratiquement les seuls visiteurs non japonais du parc, et certainement les seuls à avoir fait un arrêt par la case costume et maquillage !

Le rouge aux lèvres, des fleurs glissées dans ma coiffure, je tente de marcher le plus lentement possible afin de m’accoutumer à mon personnage, corps et âme. Vu les couleurs qui parent, tant au niveau de ma coiffure que de mon maquillage et de ma tenue, je suis une maiko. Une maiko accompagnée de son valeureux samouraï.

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Se transformer en geisha et samouraï de cinéma

François se prend vite au jeu et commence à prendre des poses tour à tour dignes des personnages d’anime japonais et de personnages du cinéma de Kurosawa. Le voilà qui sort d’une maison en courant pour répondre à un appel à l’aide… Tout son cinéma fait bien rire les autres visiteurs (et moi, je l’avoue !).

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François en samouraï
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François dans les décors de cinéma

Une maiko de cinéma

Lorsque l’on endosse le costume d’une geisha, d’une maiko, d’un samouraï ou d’un ninja, le service d’un photographe est également proposé pour prendre des photos dans le parc et poser dans les véritables décors de cinéma… Mais l’avantage de voyager avec François, c’est d’avoir son photographe privé en permanence ! Du coup, il s’en est donné à cœur joie… Voici une petite sélection de ses photos pour immortaliser mon cadeau d’anniversaire.

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Se fondre dans le décor dans nos beaux costumes
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Prendre la pose dans les décors du Studio de Kyoto
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Miroir oh mon miroir…
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En costume dans le village de style Edo
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Selfie de couple en samouraï et maiko !

Silence, ça tourne !

Nous visitons les ruelles et maisons du parc, qui sont de véritables décors de cinéma. D’ailleurs, un fil est actuellement en tournage et une partie du parc est fermée aux visiteurs. Nous pouvons rester aux abords de l’espace de tournage, derrière les barrières de sécurité, et admirer silencieusement les acteurs et l’équipe de tournage en pleine action.

C’est probablement le genre de pratique qui ne marcherait sans doute nulle part ailleurs. Ici, les visiteurs sont heureux d’avoir la chance d’observer un film en plein tournage et respectueux scrupuleusement les règles imposées : ne pas dépasser les barrières, faire silence total, ne pas prendre de photos ni filmer… Je pense qu’il y a peu d’endroits dans le monde où cela serait possible !

Visiter Toei – Studio Kyoto Park

En plus de la reproduction d’un village de la période Edo et des scènes de tournage directement visibles dans les rues, le parc Toei propose différents spectacles. Certains se déroulent à même les rues, et d’autres dans des reconstitutions de studio, avec des samouraïs et ninjas s’affrontant à l’épée et faisant mille-et-une cascades. Il y a également un cinéma 3D (que nous n’avons pas testé), une sorte de parcours labyrinthique où il faut trouver différentes bornes afin de pouvoir accéder à la sortie en un temps record, ainsi que différentes expositions autour du cinéma et des séries japonaises et, bien sûr, des boutiques et des restaurants.

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Godzilla sortant de l’eau
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Voyage dans le temps au Studio Toei
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Se promener dans le Parc Toi
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Découvrir l’envers du décor du tournage d’une série ninja
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Prendre des photos sur fond vert
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Rencontrer les super héros japonais de toutes les époques
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Labyrinthe au Parc Toei
En pratique Parc Toei Uzumasa Eigamura (ou Kyoto Studio Park) Adresse : 10 Uzumasa Higashihachiokachō, Ukyō-ku, Kyōto Site web : Toei Eigamura Tarif : l’entrée au parc coute environ 16 € (2.200 yens) Location de costume : différentes formules sont possibles, en fonction de la qualité du costume et du maquillage. Un service de photo (dans le parc ou sur fond) est également possible, mais nous ne l’avons pas fait. Une fois vêtu et maquillé, vous avez une petite heure pour marcher dans le parc et faire vos photos. 
Il existe des costumes pour adultes et pour enfants (1 mètre 10 minimum).
 À titre d’information, nous avons payé autour d’une centaine d’euros par personne (12.000 yens). Un budget, c’est sûr, mais surtout de beaux souvenirs (et puis c’était mon cadeau d’anniversaire !). Et pour vous donner une idée, la formule plus basique, sans maquillage, coute environ 35 € (4.500 yens).

Dans la peau d’une geisha, une expérience à vivre !

Cette journée passée au parc des studios Toei reste parmi les plus insolites de toute ma vie ! Entre le reflet irréaliste que je contemplais dans le miroir, les vêtements et coiffures somptueux dont j’ai pu me parer, l’envers du décor de la préparation d’une maiko que j’ai pu vivre, le plaisir de marcher dans un décor de cinéma vêtue comme une véritable actrice… Toutes ces images restent gravées dans mes souvenirs, accompagnées d’une aura d’incrédulité. J’ai beau revoir les photos, la même question me vient encore aux lèvres : c’est moi ça ?

Si vous en avez l’occasion et souhaitez sortir des activités touristiques classiques, un passage par le parc Toei est un très beau moment en perspective.

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 4 avis (4/5)

2 réponses à “Dans la peau d’une geisha de cinéma”

  1. Bonjour,

    J’ai lu avec grande passion votre article sur la transformation en geisha de cinéma.
    je rêve de partir au Japon depuis mes 5 ans, et votre article m’a encore plus donné envie!
    Nous partons en avril 2019 pour 15 jours, j’aimerais plus que tout, grâce à vous, vivre le même genre d’expérience avec maquillage, habillage pour moi ainsi que mon compagnon.
    Pourrions-nous échanger par mail ?

    Belle soirée,

    • Bonjour Amandine,

      nous donnons nos infos à un maximum de gens en les publiant publiquement, nous préférons que tu poses tes questions ici au cas où d’autres personnes seraient intéressées par les sujets que tu souhaites aborder. 🙂

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